Christelle et Cyrille Vandroux, installés à Clermont dans l’Oise, fabriquent la seule moutarde bio des Hauts-de-France, produite quasiment à 100% dans la région. Fondateur de l’atelier Honoré, le couple est engagé vers une production la plus éco responsable possible. Accompagnés par la CMA Hauts-de-France, ils participeront au MIF Expo, le salon du Made in France, qui se déroule du 8 au 11 novembre 2024 à Paris. L’occasion de faire découvrir encore plus au grand public, les saveurs à la fois fines et fortes mais surtout méconnues de la région Hauts-de-France. Et pas seulement pour piquer leur curiosité, pour ravir aussi leurs papilles !
-L’atelier Honoré porte le nom d’un évêque d’Amiens, patron des boulangers pâtissiers, pouvez-vous nous expliquer pourquoi ?
Christelle Vandroux : C’est un clin d’œil à la fois à nos parents (ceux de mon mari et les miens) qui étaient boulangers pâtissiers et au fait que notre matière première, la graine de moutarde vient de la Somme, près d’Amiens.
-Pourquoi de la moutarde, qu’est-ce qui a initié ce choix ?
CV : Après la pandémie du Covid en 2020, nous avons visité une moutarderie artisanale à Castelnaudary, la Moutarde Cathare, tenue par Ghislain Durand, qui avait notamment évolué chez Bocuse. Nous avons été épatés par son parcours et son talent à faire revivre un savoir-faire oublié. En revenant dans les Hauts-de-France, on s’est dit qu’on allait créer ce type d’établissement dans la région. Il y avait aussi d’autres facteurs qui nous y ont incités : la culture de la moutarde a chuté depuis la dernière guerre car c’était une culture non subventionnée et les agriculteurs s’en sont détournés. Au point que la production française couvre seulement un tiers des besoins nationaux. Autrefois l’Alsace et la Lorraine avaient le privilège de cultiver la graine de moutarde brune.
Par ailleurs, 85% des moutardes françaises sont réalisées avec des graines importées du Canada. Face à ce constat, cela nous est apparu encore plus évident de produire une moutarde locale.
-Comment s’est passée la suite ?
CV : J’ai suivi une formation avec la Chambre d’Agriculture en Aquitaine, mais aussi en Suisse et en Aveyron. Le projet a été ainsi validé et l’activité lancée en 2023 tout en conservant notre activité professionnelle (Ndlr : Christelle est professeur de marketing et Cyrille est banquier).
-D’où proviennent les graines de moutarde que vous utilisez et quelles sont les variétés utilisées pour la production de votre moutarde ?
CV : Le gros problème est de se procurer la graine de moutarde mais grâce à la Chambre d’Agriculture des Hauts-de-France, nous avons obtenu le contact d’un jeune agriculteur Guillaume Roussel qui cultive la graine de moutarde blonde bio dans le nord de la baie de Somme. Il a adhéré à notre projet. En revanche, la graine brune vient de Nouvelle Aquitaine. Toutefois, nous avons été contactés récemment par un jeune agriculteur du Pas-de-Calais qui en cultive. Il n’est pas encore tout à fait en bio mais c’est une excellente nouvelle, à terme nous aimerions travailler ensemble.
Nous collaborons aussi avec un producteur de sel de l’île de Ré, parce que c’est un sel naturel et aussi pour des raisons affectives, parce que notre maison familiale est à proximité de La Rochelle. Enfin, nous utilisons du vinaigre de cidre grâce à La ferme bio des Evoissons, une exploitation dirigée par Simon et Agathe Lenoir à Bergicourt dans la Somme.
La certification Ecocert, gage de durabilité
– Expliquez-nous les principales étapes du processus de fabrication de votre moutarde bio :
CV : On fait d’abord un verjus, c’est une base liquide dans laquelle on a fait macérer des graines avant de les broyer à la meule de pierre. C’est le contact entre le vinaigre et la graine qui va déterminer la réaction, qui donne le piquant. A l’Atelier Honoré, on laisse cette base macérer 48 heures puis poser. Elle est fortement piquante pendant une semaine puis s’équilibre progressivement. Nous n’utilisons pas de conservateur, de sulfites, d’additifs ou de colorants. On ajoute seulement des aromates dans la préparation selon le choix de la saveur (nature, estragon, thym citron, romarin et piment d’Espelette).
-Quelles certifications bio possédez-vous pour garantir que votre moutarde est véritablement biologique ?
CV : La certification Ecocert nous est délivrée, elle confirme nos bonnes pratiques. Elle est mise à jour régulièrement.
-Utilisez-vous des emballages écoresponsables pour vos produits ?
CV : Nous utilisons des pots en verre français. L’impression des étiquettes se fait à Lille. Nous sommes très éco responsables.
-Travaillez-vous sur de nouvelles saveurs de moutardes bio ?
CV : Nous avons beaucoup de mal à trouver des aromates français, nous travaillons avec Florixir, dans la Somme, qui nous fournit de l’estragon, du thym citron…
Nous allons essayer de trouver de plus en plus d’aromates locaux, peut-être avec une plus petite production, des produits de saison. Nous pensons à une nouvelle saveur, l’échalote.
Un nouvel atelier de production plus grand
-Comment adaptez-vous vos produits aux nouvelles tendances ou aux préférences des consommateurs ?
CV : Il y a plusieurs possibilités …Nous avons une demande récurrente de la saveur au piment d’Espelette. C’est une tendance mais pas seulement pour la moutarde. Comme nous travaillons aussi avec des restaurateurs, nous nous adaptons à la demande, ainsi notre moutarde au romarin est née d’une collaboration avec Victoire Escarfail, la chef de la Bichtrot’, la moutarde à l’estragon est issue d’un autre partenariat avec le chef Lucas Tricot.
-Etes-vous en concurrence avec les moutardes industrielles non bio ?
CV : Il n’y a pas de concurrence parce qu’on ne propose pas le même produit que les autres, d’ailleurs la plupart des fabricants réalisent leur moutarde avec du vinaigre de vin. Nous avons constaté que notre moutarde s’offre, c’est souvent un cadeau, un produit d’épicerie fine qui s’exporte d’ailleurs très bien.
-Quels sont vos projets ?
CV : Notre prochain gros défi/projet va être le lancement d’un site internet de vente. Mais on ne livrera pas car nous avons des revendeurs.
Nous aimerions aussi faire du vrac mais c’est malheureusement très contraignant du point de vue sanitaire. Enfin, nous pensons à notre développement, notre atelier de production devient trop petit et l’espace de stockage est compliqué. Cela permettra aussi de faire visiter les lieux au public et pourquoi pas de mettre en place des ateliers alliant histoire et fabrication. Nous venons d’embaucher une jeune apprentie, Manon pour la partie commerciale afin de faire encore mieux connaître l’atelier Honoré, l’un des rares à fabriquer une moutarde produite quasiment à 100% dans les Hauts-de-France.
-Vous allez exposer au MIF Expo pour la première fois, que ressentez-vous ?
CV : Nous sommes très heureux, c’est un bel objectif que nous atteignons.
Nous faisons partie du réseau La Box du coin qui fait découvrir des produits locaux et c’est comme cela que nous avons été retenus par la CMA Hauts-de-France. Nous espérons que notre moutarde séduira la clientèle du MIF Expo et fera encore mieux découvrir toutes les facettes de notre belle région (sourire).
Crédit photos DR Atelier Honoré
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